TRL / MRL

Dans le cadre de la détermination du taux d’actualisation lors de l’évaluation d’actifs intangibles, faut-il prendre en compte le taux TRL / MRL ?

Introduction

On dit souvent que « la technologie n’a de valeur que lorsqu’elle rencontre le marché ».
Cette rencontre, pourtant, n’est pas immédiate. Entre l’idée et le produit, entre la recherche et la commercialisation, s’étendent plusieurs années d’incertitudes, de prototypes, de validations techniques et de tests industriels.

C’est là qu’interviennent les notions de TRL (Technology Readiness Level) et MRL (Manufacturing Readiness Level), indicateurs du degré de maturité technologique et industrielle d’un actif.
Mais la question demeure : lorsqu’on détermine le taux d’actualisation d’un actif intangible, faut-il intégrer un ajustement spécifique lié à ces niveaux de maturité ?

TRL, MRL et risque : une pondération indispensable

Oui, car le TRL et le MRL traduisent une réalité mesurable du risque.
Un actif au stade de recherche préliminaire n’a pas le même profil qu’une technologie déjà industrialisée.
Intégrer ces indicateurs dans le taux d’actualisation permet donc de pondérer la valeur par la maturité, en reflétant la distance entre le concept et le marché.

En pratique, une technologie avec un TRL faible (par exemple 3 ou 4) présente un risque élevé de non-aboutissement, justifiant une prime supplémentaire dans le coût du capital.
À l’inverse, un actif avec un TRL ou un MRL proche de 9 est souvent prêt à être exploité, et peut bénéficier d’un taux plus modéré.
Cette approche rend la valorisation plus cohérente avec le stade réel de développement de l’actif.

Quand le TRL/MRL complexifie plus qu’il n’éclaire l’évaluation

Cependant, inclure systématiquement un ajustement TRL/MRL dans le taux d’actualisation peut poser problème.
D’abord, parce que ces indicateurs, s’ils sont utiles, restent en partie qualitatifs et dépendants du jugement de l’évaluateur.
Ils varient selon les interprétations, les secteurs et les standards utilisés.

Ensuite, leur impact peut être redondant avec d’autres composantes du coût du capital : le risque technologique, le risque de marché, ou encore la prime spécifique appliquée aux actifs intangibles non matures.
Autrement dit, introduire une correction TRL/MRL revient parfois à ajouter une incertitude sur une incertitude.

Enfin, certaines technologies peuvent présenter un TRL faible tout en bénéficiant d’un potentiel de rupture ou d’un soutien institutionnel fort (brevets stratégiques, programmes publics, consortiums industriels), ce qui relativise le besoin d’une prime excessive.

Mots du dirigeant

L’évaluation d’un actif intangible ne se réduit jamais à une formule.
Elle repose sur un équilibre fragile entre la rigueur des chiffres et l’intuition de la maturité réelle du projet.
Le TRL et le MRL ne disent pas tout, mais ils orientent le regard vers la question essentielle : à quel point cette technologie est-elle prête à vivre par elle-même ?

Synthèse

Les niveaux TRL et MRL offrent une lecture précieuse de la maturité d’un actif.
Oui, leur prise en compte dans le taux d’actualisation renforce la justesse du raisonnement économique en adaptant le risque au stade de développement.
Mais non, ils ne doivent pas devenir un automatisme ou un facteur d’ajustement mécanique.

L’approche la plus juste consiste à traduire la maturité technologique non pas par une seule prime, mais par une vision intégrée :

  • Le TRL/MRL éclaire le profil du risque,
  • Le taux d’actualisation l’exprime en langage financier,
  • Et la narration de l’évaluation relie les deux, en contextualisant chaque paramètre.

En définitive, la maturité n’est pas une donnée, c’est une lecture.
Le rôle de l’évaluateur n’est pas de punir une technologie pour sa jeunesse, mais de comprendre à quel point son potentiel est encore en construction — et d’en faire un reflet honnête dans le taux qu’il retient.